Il y a des périodes dans la vie où nous ressentons le besoin de ne pas divulguer nos sentiments, nos émotions, nos angoisses ; d'autres où il est nécessaire d'en parler car le fardeau est bien trop lourd à porter.
J'ai beaucoup à dire aujourd'hui, car garder une blessure au fond de son cœur est rarement une bonne chose.
A travers ce récit, je veux juste raconter notre histoire. L'histoire d'un couple, d'une femme, d'une mère.
Tout commence avec Guillaume, il a tout d'abord été mon voisin, puis un ami et enfin l'homme de ma vie. Notre histoire commence le 31 octobre 2001, très vite je me suis surprise à imaginer mon avenir avec lui.
Nous voulions les même choses, construire une maison, fonder une famille.
Avec les moyens de contraception de nos jours, il est facile pour une femme de décider quand elle veut faire un enfant.
Mais pour nous, ça n'a pas été le cas. 7 mois seulement après le début de notre histoire j'apprenais que j'étais enceinte. C'était un jour de juin en 2002, le jour de la fête des mères, que les premiers symptômes de ma grossesse sont apparus. Nous avions décidé de partir à Azannes, pour la journée, pour voir les vieux métiers. Pendant le trajet, je me suis sentie très mal. Au bout d'un moment, j'ai arrêté de compter le nombre de fois ou j'ai vomi. Sur le coup, l'explication était très simple pour moi : depuis toute petite, je ne supporte pas les longs trajets en voiture. Les jours passaient et je me sentais toujours aussi mal, je suis donc allée chez mon médecin traitant. Il m'a dit que j'avais une sinusite et que les vomissements étaient dus à la maladie. Il m'a prescrit des médicaments me disant que j'irais bientôt mieux. Mais je n'allais pas mieux. Un doute m'envahit : étais-je enceinte ? Je n'en avais aucune idée. J'ai pris alors mon courage à deux mains et je suis allée dans une pharmacie pour acheter un test de grossesse au cas ou !
A ma grande surprise il était positif. Le lendemain matin, ne travaillant pas, je suis retournée chez mon médecin qui me prescrit une prise de sang pour être sûr. Deux jours plus tard, il n'y avait plus aucun doute possible, j'étais bien enceinte. Je n'avais pas encore 21 ans et j'attendais mon premier enfant. Après les premières angoisses et incertitudes, le plaisir de devenir parents nous a vite submergés. Nous allions avoir un chez nous, un joli appartement dans un quartier relativement calme, avec une aire de jeux pour les enfants juste devant la porte d'entrée. Que demander de plus ? Nous étions jeunes et en bonne santé, jamais nous avions seulement imaginé qu'une telle catastrophe allait nous tomber dessus. Je vivais comme d'habitude avec en plus la joie de savoir que notre enfant grandissait en moi. Le dimanche 11 août, nous avions décidé de l'apprendre à nos parents.
Mais ce rêve c'est brutalement arrêté dans la nuit du 15 au 16 août 2002. Nous avions décidé de passer la journée du 15 au zoo d'Amnéville. Toute la journée, j'avais mal au ventre. Je me disais qu'en rentrant le soir, je me reposerais et que ça passerait... A 20h, j'étais couchée au lit. Je pensais que les douleurs allaient s'arrêter, mais elles continuaient et étaient de plus en plus intenses. Quand je me suis aperçue que je perdais du sang, nous sommes directement allés aux urgences. J'ai essayé d'expliquer mon cas aux infirmières. Elles ont vite appelé le médecin de garde. En l'attendant, une infirmière me demandait si c'étaient des contractions. Tout ce que je savais, c'est que j'avais mal au ventre. C'était ma première grossesse, comment pouvais-je savoir qu'il s'agissaient de contractions ?
Quand le docteur est arrivé, il a vite procédé à un bref examen vaginal. Le diagnostic était sans appel : "elle va expulser !" Tout c'est passé tellement vite que nous avions à peine le temps de comprendre.
NOUS ALLIONS PERDRE NOTRE BEBE.
J'ai été endormie lors de l'expulsion et je n'ai pas pu voir mon bébé. Lorsque je me suis réveillée, j'ai demandé si c'était un garçon ou une fille. C'était un petit garçon, nous avions donc un fils, nous l'avons appelé Nathan.
Je me souviens que Guillaume était venu me voir à l'hôpital avec un énorme bouquet de fleurs. Je lui ai dit : "On offre des fleurs à sa femme quand elle met un bébé au monde, pas quand elle en perd un ."
Nathan a quitté notre vie, sans cri...
Cependant, le temps a fait son office. Sans oublier Nathan, notre tristesse et notre douleur sont devenues moins intenses au fil des mois.
Nous pensions très fort à cet enfant, surtout les jours de fêtes. La période la plus difficile pour moi est Noël. Je ne sais pourquoi, mais j'ai toujours aimé l'hiver, le mois de décembre, la fête de Noël et tout ce qu'elle représente. Le premier Noël après avoir perdu Nathan a été très difficile pour nous, mais surtout pour moi. Je voyais tous ces enfants autour de moi, tout cet amour, toute cette joie, et moi, moi qui ne connaîtrai jamais mon fils, n'entendrai jamais ses rires, ses pleurs. Je ne le prendrai jamais dans mes bras. Je ne goûterai jamais à la saveur de ses baisers. Il ne saura jamais à quel point je l'aime.
Malgré la tristesse qui était présente, il nous fallait continuer pour pouvoir un jour donner un petit frère ou une petite sœur à notre enfant chéri.
Isis